lundi 20 juillet 2009

Publication...

Le Bain de Novembre d'Hervé MESTRON suivi de Peuple et chroniques de Loire (récits de collégiens) a été publié par la Bibliothèque intercommunale.



Illustré par de nombreux dessins des élèves de Tillier ou Notre-Dame et des reproductions d'oeuvres du Musée de la Loire, l'ouvrage est consultable dans les Bibliothèques du Pays Bourgogne Nivernaise, dans les écoles-collèges de la Communauté de Communes Loire et Nohain et au Musée de la Loire (dans l'exposition).

mardi 26 mai 2009

bilan de résidence

QUELQU’UN VEUT DU CAFE ?

Hervé Mestron a été en Résidence dans la Nièvre de Février à Avril 2009.
La structure d’accueil, l’association l’Îlot Livre, lui a demandé un bilan de Résidence. Il s’est jeté à l’eau.

Finalement, tout ce qui ne relève pas de la littérature devient important. C’est déroutant et motivant. Limite schizophrénique. Vous passez votre vie à essayer d’exprimer une émotion avec des mots, façon soliste, devant un parterre invisible, et puis on vous convie à intervenir in situ, dans la réalité rurale, au milieu de cœurs vitaminés et de regards dubitatifs. Je ne suis plus celui que je croyais être. Je ne dois plus l’être de toute façon, sinon c’est raté. Exit l’angoisse de la pantoufle et le confort de la page blanche. Quand ça ne vient pas, j’écoute un quatuor de Mozart en réparant la fuite dans les toilettes. Parfois je fais la vaisselle aussi. C’est vraiment une vie difficile. Parfois il y a un mail, dans lequel votre éditeur vous dit qu’il n’a pas encore eu le temps de lire votre manuscrit. Pas le temps ? Qu’est-ce qu’il fait de ses journées ? Peut-être une grosse vaisselle.
Dans le monde de l’entreprise, on expédie les chefs de service dans des trekkings psychologiques. Ils ressortent positivement ébranlés par cette « formation » et répandent à leur retour, gonflés comme des Goodyear, la sève de leur combattivité remise à neuf.
J’ai toujours eu beaucoup de mal à rédiger le bilan d’une Résidence. En fait, je me suis toujours débrouillé pour ne pas le faire, et ce n’est pas bien. Non, Hervé, ce n’est pas bien du tout. C’est bien beau de chercher la notion d’absolu dans les textes, d’attendre l’élévation comme on guette la pluie dans le désert. Mais une Résidence, c’est concret. Ce n’est pas le monde tel que tu l’imagines, c’est l’autre, le vrai, dans toute sa complexe douceur. Avec une association pilote, un CRL ou Drac à la colle, des enseignants détachés, des bibliothécaires café croissants, des maisons d’hôtes repeintes à neuf, des élèves hilares (vous comprenez assez vite que c’est à cause de vos chaussettes dépareillées) et des vieux qui vous rappellent que, bientôt, ce sera votre tour d’avoir 104 ans.
Et ça fait beaucoup d’émotion tout d’un coup. Je cesse totalement de penser à moi, je n’y arrive pas et ça me fait des vacances dans un sens. C’est d’ailleurs pour cette raison que je suis capable d’animer un atelier d’écriture vêtu comme un plouc, avec un pantalon à carreaux et une chemise à rayures. Je n’existe plus. Mon centre a volé en éclats.
J’ai l’impression de visiter les pyramides d’Egypte, muni d’un appareil photo en bandoulière et d’une bouteille d’eau dans la poche, porté par une insondable magie humaine, m’indiquant ci et là les chemins tortueux de la connaissance.
Parfois, j’ai l’impression d’être un chef d’état en visite dans une zone sinistrée. Chaque mot que je vais prononcer sera d’une importance capitale. Plutôt que de penser à mes chaussettes, j’évalue au contraire l’ampleur de la tache.
Je dois absolument me convaincre que je ne suis pas là par hasard.
La résidence a duré trois mois. Le premier mois, durant mes 70% alloués, j’ai replongé dans mon quotidien textuel, finalisant un roman jeunesse, le peaufinant même, allez osons ! C’était l’équilibre parfait, les montagnes d’Heidi, l’exaltation d’une solitude choisie, le centrage ad hoc flirtant avec le mythe. Vous savez, le mythe de l’écrivain dans sa tour rurale, composant sa poésie en regardant paître les brebis, ou en écoutant les mulots la nuit, ronger les plinthes du gite à la ferme. Je me suis fait une coupe de cheveux à la Goethe et j’ai lu mes textes à voix haute, gueulant jusqu’à la rupture des cordes vocales pour entendre ces fameuses harmoniques de l’au-delà, polyphonie subliminale de mes pensées.
Bon, en même temps, j’ai peut-être abusé du Sancerre, qui sait, j’étais dans la Nièvre.
Le deuxième mois, j’ai stoppé toute velléité romanesque. Cela m’a semblé trop lourd tout d’un coup. Narrativement, j’étais usé. Mon pauvre Hervé, c’est très triste. Mais comme je suis plutôt un acharné du travail, obsédé conviendrait mieux, j’ai quand même ouvert mon document Word. J’ai pondu des dialogues et exclusivement des dialogues, mon médecin m’avait interdit les excès narratifs. Une fiction radiophonique, que j’ai aussitôt envoyée à mon producteur à France Inter. Pas belle la vie ?
Mais je dois reconnaître que j’étais déjà très loin de mon écriture, je n’y pensais même plus, elle avait cessé de me happer. Je crois qu’il n’y avait plus de place pour elle. C’était génial. Le matin, avant d’aller rencontrer la population, j’écoutais la chronique de Stéphane Guillon en prenant ma douche.
Je parle de moi, je dis tout tout tout. Le troisième mois est arrivé. Et je n’ai plus écrit le moindre mot. Je me suis contenté de faire écrire la population. J’étais le patron. « Toi tu écris un texte sans la lettre Z, toi tu rédiges des mémoires imaginaires, toi tu nous parles de la légende du marinier manchot. » La population écrivait, suant sang et eau, et moi j’attendais. A la fin des lectures, pareil au Dalaï Lama, je bougeais une paupière. J’étais bouleversé par toutes ces écritures. Je me levais et demandais : Quelqu’un veut du café ?
Et puis j’allais me moucher aux toilettes.



Dernière publication.
Le violoncelle poilu, éd Syros, 2009.

dimanche 17 mai 2009

Les agios en moins.

Bon, Hervé, allez, un bilan de résidence ! Vas-y, lance toi !
Oui, je défais mes valises, je rentre d'un long voyage, là. C'est comme si j'étais sous l'effet d'un bizarre décalage horaire. Ah, ces artistes !
Je vais faire comme avec ma banquière, demander encore un peu de temps. Les agios en moins !
à très vite !
hervé